Une sociologue (non complexée) nous éclaireCécile Charlap,
sociologue ayant notamment travaillé sur une étude intitulée "Perception de la beauté de la femme", nous parle du beauty-diktat. Notre époque accorde-t-elle particulièrement de l'importance à l'apparence ?Disons pour résumer que l'apparence a toujours été essentielle pour l'individu, mais que notre société de consommation y ajoute un nouveau rapport au corps, ainsi qu'un culte de l'image "qui fait vendre".
L'apprence est fondamentale, parce qu'elle est au coeur même de notre rapport à l'autre.
Elle est ce que l'autre perçoit en premier de moi, c'est la toute première forme de communication !
Avant même que je sache parler, puis avant même que j'adresse la parole à quelqu'un, on a déjà porté un regard sur mon apparence.
Et je ne peux m'en séparer, elle fait partie de mon identité.
Aujourd'hui, la nouveauté, c'est que le corps a une dimension centrale.
Comme notre société hyperindividualiste a atomisé les individus, l'importance du corps social a fait place au repli sur le corps individuel.
Du coup, celui-ci est devenu un capital à faire fructifier, et l'homme est devenu le manager de son propre corps !
Il y investit du temps et de l'argent -en en attendant un retour...
L'apparence est devenue un but en soi.
Lors de votre étude sur la beauté des femmes, qu'est-ce qui vous a le plus frappée ?La souffrance, il y a la souffrance de ne pas être un "canon de beauté", mais il y a aussi les souffrances que les femmes s'infligent pour tenter de s'en rapprocher (privations alimentaires, astreintes sportives, opérations esthétiques...).
Les femmes ont tellement bien incorporé les diktats actuels de beauté qu'elles ne luttent pas contre ceux-ci, mais contre elles-mêmes !
Les personnes les plus belles ont-elles une vie meilleure dans notre société de l'image ?Pas forcément.
D'une part, dans la mesure où la beauté est "extra-ordianire", elle nous est un peu étrangère.
Exactement comme la difformité, elle interpelle.
De ce fait, elle expose son pssesseur : on l'observe, on le scrute...
Il est ainsi confronté à la fascination, l'envie, la rivalité ou la jalousie.
D'autre part, la beauté étant remarquable, on a inconsciemment tendance à penser que les personnes belles auraient également une vie extraordinaire.
Un des revers de la médaille des "bombes" est donc aussi de décevoir par leur normalité, leur faillibilité.
Source : marie-Claire