Charlotte, 27 ans
"Dani est syrien.
On s'est rencontré en Russie où l'on faisait des études de théâtre.
On a décidé de vivre ensemble en France où j'ai de la famille, des amis. La France, c'est mon pays, j'en avais toujours été fière... On a vite compris que, vu la situation de Dani, la seule solution pour nous était le mariage. Mais le temps que l'on rassemble et que l'on fasse traduire la tonne de documents administratifs qui nous étaient demandés, son visa est arrivé à expiration.
Du jour au lendemain, il est devenu hors-la-loi et donc expulsable. J'ai commencé à connaître la peur de la Police... dans mon propre pays et simplement parce que j'étais amoureuse d'un étranger. Le matin, on réfléchissait à la façon dont il devait s'habiller pour ne pas attirer l'attention.
Il ne pouvait pas travailler, je payais tout. J'ai pris un job dans une boulangerie et, aujourd'hui, je me lève toujours à 4 h du matin. Par peur, il restait à la maison toute la journée, enfermé, à manger et à regarder la télé. Dès qu'il sortait, je m'imaginais le pire. Toutes les factures étaient à mon nom mais, un jour, on nous a demandé de prouver que nous habitions ensemble depuis un moment déjà... C'était kafkaïen.
Ce qui nous faisait tenir, c'était de penser au mariage. Au bout d'un an et demi de galère, on a enfin pu y arriver...
Dani a mis encore 6 mois a obtenir un permis de séjour d'un an qui lui permet de circuler librement et de travailler.
Quand j'ai rejoint le
collectif des "amoureux", j'ai d'abord été soulagée de voir que mon histoire n'était pas isolée. Et puis ça m'a mise en colère.
J'ai décidé de rester et d'essayer de faire bouger les choses.
Tous les mardis, je vais aux réunions
pour apporter du soutien aux couples en difficulté.
Grâce à l'aide d'une juriste, on a essayé de
transformer cette colère en action.
Tous les 14 février, on organise un "bal des Amoureux" où l'on invite les élus lyonnais.
On a rédigé la Déclaration des amoureux au ban public, lue un soir sur la scène du Zénith, à Paris. C'était extrèmement fort.
Aujourd'hui, un vrai réseau s'est créé, des amitiés.
Il y a un moment de ma vie où j'ai eu le sentiment de subir tout ce qui m'arrivait.
Maintenant, je suis dans l'action.En réunion, j'ai
appris à m'affirmer, à tenir bon sur des positions et à faire des compromis sur d'autres.
Il n'y a aucune hiérarchie, chacun est libre de dire ce qu'il veut.
L'engagement, c'est aussi une école de la liberté.Les amoureux au ban public
Mouvement de couples mixtes pour la défense du droit de mener une vie familiale
Le 14 Février, bal des Amoureux à Lyon et à Paris
Source : Avantages - Janvier 2009