Bonjour les filles,
Tout avait pourtant bien commencé :
une femme...l'Afghanistan...la pierre de patience...le prix Goncourt....
" Cette pierre que tu poses devant toi....
devant laquelle tu te lamentes sur tous tes malheurs, toutes tes misères...
à qui tu confies tout ce que tu as sur le coeur et que tu n'oses révéler aux autres...
Tu lui parles, tu lui parles.
Et la pierre t'écoute,
éponge tous tes mots, tes secrets, jusqu'à ce qu'un beau jour elle éclate.
Elle tombe en miettes.
Et ce jour-là, tu es délivré de toutes tes souffrances, de toutes tes peines...
Comment appelle-t-on cette pierre ? "
En Afghanistan peut-être ou ailleurs, une femme veille son mari blessé.
Au fond, ils ne se connaissent pas.
Les heures et les jours passent tandis que la guerre approche.
Et la langue de la femme se délie, tisse le récit d'une vie d'humiliations, dans l'espoir d'une possible rédemption.
Syngué sabour
Pierre de patience
de Atiq Rahini
Ce court roman,
prix Goncourt 2008 (
écrit directement en français et non en persan ) est l'oeuvre de
Atiq Rahini né en 1962 à Kaboul en Afghanistan qui vit et travaille à Paris.
C'est un ouvrage en mémoire, en
hommage à la poétesse Nadia Anjumann assassinée ( rouée de coups ) par son mari en 1985 à l'âge de 25 ans.
Au chevet de son époux inconscient,
une femme veille ;
et soigne ;
et prie ;
et déroule en paroles le fil de sa vie.
Dans une longue litanie, elle livre les espoirs avortés, les illusions perdues, les petits bouts de tendresse, l'angoisse permanente, la peur, la rage, la douleur...
Elle murmure, elle crie, elle pleure, elle gémit....
elle raconte la bêtise des hommes...la vantardise des hommes....la folie des hommes....la religion des hommes...
Dans un flot de mots crus, violents, provocants, audacieux, libérateurs,
elle dit l'enfermement, l'aliénation, la négation de cette société privée de paroles, d'amour, d'espoir.C'est un
conte cruel qu'Atiq Rahini nous offre ici,
un récit dur, intense ;
un huis-clos éprouvant, étouffant ;
aucun dialogue, un espace fermé, des phrases courtes, des mots bruts ;
un style presque théatral : unité de temps, de lieu et d'espace.
Un peu plus de 100 pages où
l'horreur est permanente,
la folie toute proche ; où
la colère bouillonne et où tous nos sens vibrent, se hérissent et s'arc-boutent ...
C'est un livre sur le
combat des femmes musulmanes face à l'intégrisme.C'est un livre sur la douleur des femmes, sur la douleur d'un pays, sur la tradition, sur la religion.
C'est un livre tragique et universel.
C'est un livre sur une soeur du bout du monde.Et pourtant....pourtant...je n'ai pas accroché...je suis restée en retrait, spectatrice de cette vie dévastée, douloureuse, sans espoir...
Comme pour me protéger...pour ne pas avoir à faire face à l'inhumain...
......" Le froid ou l'émotion, les larmes ou la terreur saccadent son souffle. Elle tremble. "....
Comment accepter, ici, le poids de l'horreur de là-bas ?
Atiq Rahini a dit à propos de son roman :
" Je ne crains pas de dire la barbarie ou la décadence. "Oui, mais comment l'accepter ????
Rondine et les livres