Johanna, 28 ans, 2 enfants
"Je suis issue d'un milieu aisé où l'engagement se résumait souvent à de la
charité.
Mes parents étaient marchands de biens.
L'hiver, mon père payait des gens pour surveiller les immeubles vides afin qu'ils ne soient pas squattés.
A l'âge de 15 ans, un voyage en Sierra Leone a bouleversé ma vie.
Puis, après m'être "cherchée" professionnellement, j'ai atterri dans une agence immobilière. J'ai découvert les difficultés rencontrées par les étudiants et les personnes âgées pour se loger.
L'agence me demandait d'exiger des garanties toujours plus importantes.
A chaque visite, plus de 25 personnes venaient et espéraient.
C'est dans ce milieu que j'ai rencontré mon mari. Il m'a parlé de
"réquisition citoyenne" : entrer dans des immeubles vides pour y installer des étudiants, des artistes, des familles à petits revenus qui ne peuvent plus se loger dans Paris...
Ca m'a tout de suite parlé.
Je n'aime pas la désobéissance en tant que telle, mais celle-là me paraît juste.Pour moi, le milieu du
militantisme était complètement nouveau.
A la 1° réunion où j'ai dû présenter un projet, j'ai été incapable d'ouvrir la bouche !
J'avais un problème de légitimité, je cherchais les clés de ce milieu.
Militer m'a appris à me débrouiller toute seule, pour aller chercher des fonds par exemple, alors que j'étais plutôt habituée à me faire servir !
Ca m'a aussi enseigné
le plaisir de faire bouger les choses de façon collective.
Aujourd'hui, j'ai conscience de ce que je suis et de ce que je peux faire.
Je m'occupe du pôle international de
macaq ou plutôt le Mouvement d'animation culturelle et artistique de quartier.
Nous avons monté une école au Sénégal avec l'aide de la population.
Les fonds viennent entre autres de
friperies solidaires que nous organisons ici, dans le quartier des Batignolles.
Aujourd'hui, la Mairie du XVII° nous a confié la gestion d'un lieu que nous avions squatté il y a quelques années. Lors de l'inauguration, une vieille dame m'aborde : "Je suis contente que vous soyez là, avant vous, il y avait des squatteurs !" J'ai éclaté de rire et lui ai répondu : "Vous savez, nous sommes ces squatteurs ! La mairie a décidé de nous confier ce lieu pour y faire des animations de quartier". Après un 1° choc, elle a ri de bon coeur avec moi et nous avons discuté."
Source : Avantages - Janvier 2009